Zoogalerie présente
LE FESTIN – LE JARDIN
Une exposition de
PIERRE MALPHETTES
Du 8 mars au 12 avril 2003
Les pièces de Pierre Malphettes se situent résolument du côté du voyage, du déplacement , elles témoignent des multiples tentatives de l’être humain pour s’affranchir des “lourdeurs”et des barrières en tout genre. La gravitation, chez Malphettes, symbolise le destin qui fait inexorablement rechuter l’être humain vers la terre, vers un retour programmé à la réalité, à l’absence de rêve. Son travail s’y réfère comme une barrière dont il faut constamment éprouver les limites à travers la mise en place de “dispositifs de légèreté”: sa Dédicace aux oiseaux est une sorte de danse aérienne de sacs plastiques qui semblent se jouer de la pesanteur. Cela dit, les pièces de Malphettes incorporent dans le même mouvement des éléments contradictoires à leur efficacité: Le tapis roulant en est un exemple édifiant qui voit rajouter quatre roues à un tapis et donc l’empêcher de “partir” ; Le Tapis volant en est un autre quand il est accroché au mur…
Car l’exploit est uniquement réalisable sur le plan poétique: il n’est de projet qui ne s’affranchisse des contraintes terrestres que par l’entremise de la métaphore ou de la plaisanterie; ainsi ses dispositifs sont avant tout des véhicules sans chauffeur, sans réelles destinations sinon que celle du cheminement intérieur (traverser les nuages, image réversible d’un avion en nuage).
Sorte de pendant géographique et architectural à la gravitation, le labyrinthe est cette autre figure de la restriction qui alimente tout aussi fortement le travail de Pierre Malphettes dans son désir de liberté, cette tension vers l’ouverture. Son plan de Paris uniquement constitué de sens uniques traduit bien cette unidimensionnalité moderne qui rend dérisoire la dérive urbaine prônée par les situationnistes et qui annule la possibilité d’un émerveillement et d’un exotisme de la ville au profit d’une logique de déplacement pour le déplacement. Ses dispositifs sont toujours hantés par la figure de l’enfermement, même si parfois la transparence de pseudo murs en plastique transparent semble évoquer un possible franchissement (cloisonnements).
À Zoo galerie, Pierre Malphettes semble s’être tourné vers des figures plus familières, objets ou situations moins mythiques que celles qu’il a pu aborder précédemment, dans une exploration/recréation jubilatoire de la “domesticité”. Si l’artiste a déplacé son travail vers d’autres horizons formels, on retrouve en filigrane quelques-uns parmi les motifs évoqués ci-dessus. Ce domestique dont il est justement question semble avant tout convoqué pour son côté labyrinthique: les relations amicales qui enserrent les protagonistes de la fête dans un réseau inextricable d’espoirs et de projections (le festin); les circonvolutions de la mouche à l’intérieur de ses “couloirs aériens” invisibles. Ou bien encore cette plantation d’avocats (le jardin), version cheap des relations nature/culture derrière laquelle on pourra être tenté d’y lire l’obsession de la ménagère ou l’enfermement du jeune étudiant. Mais la stratégie de la déception est piégée de l’intérieur, la gangue des émotions et des contemplations peut être brisée et valser en de multiples scénarios inattendus: le buffet autour duquel les convives s’agitent explosera littéralement dans une chute spectaculaire et cathartique; le ressassement de la mouche devient itinéraire de lumière; quant à la plantation d’avocat, son socle low tech et son éclairage au sodium la font définitivement échapper au terre-à-terre et dériver vers d’autres champs.
Pierre Malphettes est représenté par la galerie Kamel Mennour, Paris.
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